Si le nom de certains pays n’évoque rien à personne, Andaman et Nicobar sont devenues tristement célèbre lors du Tsunami meurtrier de décembre 2004. La dernière expédition majeure dans cette entité DXCC fût l’expédition menée par VU2RBI, VU2DBP, VU3RSB, VU2MYH et VU3DVS en 2004. Profitant de cette soudaine reconnaissance, le NIAR (National Institute of Amateur Radio) de Hyderabad, négocia la tenue d’une seconde opération. Se sentant épaulé par les différentes agences gouvernementales, et suite à la visite des salons de Dayton et Friedrichshafen, l’idée d’une convention organisée sur les Iles Andaman et Nicobar germa. Préparation : Dès l’annonce d’une possible activité ouverte aux étrangers, une avalanche de messages s’abattit sur les différents forums spécialisés. Parallèlement à ce soudain remue-ménage, le NIAR reçut de multiples inscriptions alors même que les termes de cet événement n’étaient pas encore clairement définis. Le monde entier semblait se donner rendez-vous à Port Blair. Cependant, aucune garantie n’était donnée aux opérateurs étrangers quand à la possibilité d’obtenir l’autorisation d’émettre. Cet audacieux projet restait bel et bien flou. Malgré un cruel manque de détails nous nous sommes lancés dans le remplissage des dizaines de pages de formulaires (certains en 5 exemplaires). Le NIAR coordonnait tant bien que mal l’afflux de ces documents au fur et à mesure de l’avancement des démarches. Malgré la publication de quelques détails, beaucoup de questions restaient en suspend. Deux semaines avant le départ, seule une demi-douzaine d’opérateurs étrangers sur la centaine attendus avait leur licence VU3xxx, première étape avant l’indicatif VU4. Pour notre part, nous fûmes baptisés VU3SIB (F4EGD) et VU3SIC (F5CWU) seulement deux jours avant notre départ ! Ces incertitudes furent pour certains l’occasion de mettre en doute le sérieux de cette histoire. Beaucoup de prétendants aux voyages ont ainsi jeté l’éponge au fil des semaines ce qui ramena le nombre d’étranger à 28. Toutefois, le futur a donné raison aux audacieux, laissant les oiseaux de mauvais présages à leurs médisances. Obtenir le précieux sésame pour trafiquer depuis VU4 valait bien la peine de prendre quelques risques financiers (visas, billets, papiers…). Andaman & Nicobar : Les Îles Andaman et Nicobar sont un territoire de l’union indienne couvrant 8 300 km² situé à environ 800 km au Sud-est de l’Inde dans le golfe du Bengale, au large des côtes de Birmanie. Elles sont séparées par le 10° parallèle Nord et offrent à l’Inde un espace maritime immense, en plus du contrôle presque total du golfe du Bengale et de la mer d’Andaman. La capitale est Port Blair. La population estimée est d’environ 350 000 habitants. Longtemps les prisonniers politiques ont été exilés dans ces îles au climat rude, à la nature sévère, et aux maladies multiples. Ce territoire, composé de plusieurs centaines d’îles, héberge depuis des milliers d’années des tribus indigènes, qui encore aujourd’hui, arrivent pour certaines à éviter le contact avec nos civilisations. Lors de notre arrivée à l’aéroport, un document nous a été remis, précisant les îles ouvertes aux touristes et celles où l’accès est interdit pour différentes raisons. Le voyage : Afin de profiter d’une synergie de groupe et dans un souci tant logistique qu’économique, nous avons formé une équipe d’une dizaine de personnes. Nous nous étions presque tous déjà côtoyé lors de précédentes opérations et une certaine complicité était déjà en place Nous savions qui serait là quand tout va bien, et qui serait le photographe lors du montage et démontage des antennes. N’ayant pas tous le même planning, l’équipe s’étoffa au fur et à mesure des arrivées. Les premiers ont principalement résolu les problèmes d’hébergement car malgré une réservation bien en amont de cette opération, nous avons été contraint de trouver un autre site pour des raisons de dégagement vis-à-vis du relief local. Nous avions comme impératif de rester dans Port Blair ce qui limite quelque peu le choix. L’hyper centre souffre d’une pollution radio-électrique conséquente et rend les opérations sur les bandes basses délicates. Après d’âpres négociations, nous avons pris nos quartiers au « Camping Ressort ». Situé à flanc de colline, nous avions une vue imprenable sur l’océan indien, bien que cette direction ne soit pas la plus intéressante (Océanie). Ce complexe, financé par le gouvernement, est composé d’une dizaine de « tentes suisses », montées sur dalles de béton. Bien que les travaux ne soient pas achevés, le manager accepta de nous accueillir pour les 10 jours de la convention. Dès notre arrivée, nous avons loué l’ensemble des infrastructures disponibles pour éviter qu’une autre équipe ne vienne s’y installer. D’autres n’ont pas pris cette précaution et se sont retrouvés piégés ! Avant le départ, chacun avait reçu la liste des équipements à emporter pour former les quatre stations que nous comptions mettre en oeuvre. Notre inquiétude se portait principalement sur les contrôles dans les aéroports. Convoyer du matériel radio reste parfois délicat surtout dans certains pays, un brin suspicieux. L’accueil fût chaleureux et vraiment bien organisé. Que ce soit à Madras, notre porte d’entrée en Inde (à 2h du matin !) ou à Port Blair, à chaque fois nous étions attendus et guidés. Sur place, les autorités aéroportuaires avaient vraisemblablement été prévenues de notre arrivée avec du matériel de télécommunications car à aucun moment nous n’avons eu de contrôle des bagages contenant amplis, antennes, émetteurs. Le mot « Hamfest » ouvrait toutes les portes. La Hamfest : Personne n’avait d’idée précise sur le déroulement de cette Hamfest ni même de programme détaillé. Nous restions focalisé sur la partie radio de cette aventure même si certains avaient en charge la présentation de dossiers aux autorités. Pendant la phase préparatoire, il nous fut demandé de rédiger un article pour le livre souvenir. Offert à tous les participants, il reflète au mieux les différentes facettes du radio amateurisme (formation, technique, concours, expédition…). De belle qualité, ce fut un présent apprécié par les autorités et par tous les participants, tout comme la sacoche remise le premier jour de la convention. La cérémonie d’ouverture fut célébrée en grande pompe par le gouverneur de l’île, protégé par des gardes en armes. Le point d’orgue fût l’allumage de la bougie, signe du début des festivités. Puis ce fût un déluge de remerciements pendant quelques heures. Bien que ces longues congratulations soient dénuées d’intérêts, nous nous devions d’être présent par correction et reconnaissance envers toutes les personnes qui, de longs mois durant, se sont investies dans la préparation de cet événement. Aussi, notre présence à de très protocolaires réunions était souhaitée afin de garder un esprit de groupe. Huit jours d’activités valaient bien quelques sacrifices. Aussitôt le programme de la journée achevé, chaque équipe se ruait vers des taxis pour rejoindre les camps respectifs. Chaque parcours en taxi s’est avéré être un chemin de croix. Outre la distance, c’est bel est bien l’attente qui nous pénalisa le plus. Il n’était pas rare d’attendre une heure un improbable taxi (qui parfois n’est jamais venu). Que de temps perdu ! Quand enfin nous étions rendu à destination, l’activité radio commençait immédiatement quelque soit l’heure. Bien que les meilleurs créneaux soient placés en soirée et en fin de nuit, chacune de nos apparitions provoquaient de solides pile-up. L’Asie constituait le foyer amateur le plus représenté sur l’air depuis Andaman bien que notre attention se soit porté particulièrement sur l’Europe et les États-Unis. Les jours se suivaient mais ne se ressemblaient pas et de grandes disparités de propagation furent observées. Si le 17 et le 20 mètres s’en sortaient plutôt bien, les 10/12/15 mètres étaient un peu plus capricieux. Ouverts sporadiquement, nous en avons néanmoins profité. Côté équipement, les antennes s’articulaient autour de 2 Spiderbeam, de verticales et de filaires pour couvrir toutes les bandes de 160 à 10m. Pour ce qui est des émetteurs nous avons à nouveau opté pour des Eleckraft K2 couplés pour trois d’entre eux à des amplificateurs. Des filtres passes bandes (WXØB et Dunestar) ont été utilisés. Si la cohabitation dans le camp était simple, il était plus complexe parfois de trouver un endroit où s’installer sur le 20 et le 17 mètres alors que d’autres équipes y étaient déjà. Cette multitude d’indicatifs VU4AN fût d’ailleurs à l’origine de nombreuses confusions. Chaque journée offrait son lot d’imprévus, telles que des réunions surprises (aux heures où les bandes sont le plus ouvertes) ou bien des tempêtes mêlant vents violents et pluie, provoquant chutes d’antennes et longues coupures de courant. Concernant l’alimentation électrique, il faut noter que les câbles moyenne tension sont isolés au ruban adhésif, qui vraisemblablement ne supportent pas l’humidité. Aussi, nous avons été contraint d’attendre à différentes reprises que la brigade des électriciens arrive au guidon de leurs mobylettes. A chaque intervention, la réparation consistait à secouer le poteau sur lequel est fixé le transformateur. Si cette opération ne suffisait pas, un des agents grimpait (en tongs) afin de secouer les fils jusqu’au moment ou l’électricité revenait. Bien qu’efficace, il aurait été plus judicieux d’isoler correctement tous les conducteurs ce qui éviterait d’incessants allers-retours avec tous les désagréments que cela entraîne. Pendant près d’une semaine de nombreuses personnes sont venues à notre rencontre afin de découvrir les équipements utilisés. Ce fut l’occasion de riches échanges. Au terme de cette semaine d’activité, nous sommes repartis avec près de 20 000 contacts dans le log (sur les 80 000 réalisés par VU4AN). Au regard d’une expédition « classique » cela est bien peu mais comme j’aime à le souligner, nous n’avons pas pu mener cette activité comme une expédition DX où le nombre de QSO est un des leitmotiv. Dans l’objectif de décrocher un ticket pour mener une opération depuis les îles Laccadives (VU7), nous devions nous impliquer dans cette Hamfest quitte à perdre quelques heures de trafic. A de nombreuses reprises, les délégations officielles sont venues elles aussi à notre rencontre. Ce fût là encore un réel plaisir d’exposer les possibilités de notre hobby à un public attentif et intéressé. Au passage, un des directeurs d’agence est venu étrenner son indicatif fraîchement obtenu après avoir satisfait à l’examen de compétences. Beau début ! Ces visites furent aussi l’occasion d’aborder le sujet brûlant des Laccadives sans toutefois obtenir de réponse précise. Malgré tout, ils nous ont assuré qu’aucun frein ne s’opposait à une activité du même style et qu’ils seraient nos alliés dans la préparation de ce dossier. Retour : Dès la fin de l’opération, nous avons migré sur Havelock, une île située à une quarantaine de kilomètres de Port Blair pour y apprécier les paysages et les plages de sable fin. Le mauvais temps a laissé place à une demi-journée ensoleillée avant que vent et pluie ne reviennent. La violence des bourrasques ne présageait rien de bon et c’est avec un calme olympien que les gérants de l’hôtel nous ont informé qu’un cyclone venant du Nord s’avançait sur Andaman. Il était déjà trop tard pour quitter l’île car les communications maritimes venaient d’être coupées pour un minima de 3 jours, le temps de voir l’évolution des choses. Rapidement la nouvelle avait fait le tour de l’île et les quelques touristes croisés n’avaient qu’une idée, la quitter. Pris au piège, nous avons tout de même pu sillonner Havelock sous une pluie ininterrompue. Malgré la bonne ambiance dans le groupe, l’inquiétude était palpable. Sans information complémentaire nous avons fait repousser la date de nos billets d’avion (merci à F5MOO – F1OMI). Le 3ème jour, la situation s’était calmée et le soleil venait de nouveau caresser la cime des arbres et sécher les pistes détrempées par plusieurs jours de précipitation. Dès l’aube, le ciel était complètement dégagé, sans aucun nuage, signe que la perturbation météo s’éloignait. Informé qu’un ferry devait partir, nous nous sommes rapprochés du port, tout comme la majorité des touristes. Abandonnés par les agriculteurs de l’île, des milliers de bananes et de mangues pourrissaient au soleil sur les quais, leur transport vers Port Blair n’ayant pu être assuré les deux jours précédant. Après doutes et incertitudes, le bateau obtint finalement le feu vert des autorités maritime pour rallier South Andaman. Après quelques jours sous tension, nous nous sommes finalement envolés vers le Sud de l’Inde. Guidés par VU2DH nous avons découvert Madras et Pondichéry. Ce fût également l’occasion de rencontrer VU2GHX et VU2HVZ (XYL), VU2GMN ainsi que VU2SDU qui mit son installation à notre disposition le temps de faire quelques contacts. Premier séjour prolongé en Asie, cette nouvelle aventure reste une expérience inoubliable que beaucoup s’en veulent d’avoir raté en jetant l’éponge prématurément. Depuis notre retour en France, nous avons suivi l’évolution du dossier VU7 qui est maintenant abouti. Grâce à une prestation réussie à Andaman et au soutien inconditionnel des différents ministères, nous nous préparons à voyager de nouveau dans cette partie du monde après avoir obtenu les autorisations nécessaires pour trafiquer depuis les Laccadives. Prévu initialement en janvier, puis décalé en décembre, le séjour s’effectuera finalement aux alentours de la mi-janvier. Dès le début décembre, un autre groupe, mené par l’ARSI (membre IARU en Inde) devrait être présent depuis une des îles des Laccadives. Eux aussi ont obtenu l’autorisation du gouvernement qui ne pouvait pas refuser à certains ce qu’il accordait à d’autres. Malheureusement, et pour s’assurer l’exclusivité, cette association a tout mis en œuvre pour ruiner notre projet (courriers aux sponsors, au gouvernement ainsi qu’une malsaine propagande pour ôter tout crédit à notre dossier). Bien que l’ensemble des documents soit en notre possession, nous avons finalement décidé de ne pas partir en décembre pour éviter tout affrontement avec ces individus, piètres représentants du radio amateurisme. C’est avec de tels agissements, qui peuvent paraître sans gravité, que la crédibilité du radio amateurisme est mis en porte à faux. Des agissements similaires dans le passé ont conduit des gouvernements à verrouiller l’accès à certains sites, ou même à limiter la délivrance de licences… à méditer !!! Quoiqu’il en soit, nous serons sur l’air à partir du 15 janvier 2007 et ce pour dix jours avec l’indicatif VU7RG. Trois équipes (dont une avec 3 opérateurs français F6IIT, F4EGD et F5CWU) seront actives depuis trois îles différentes (Kadmat, Agatti, Bangaram). Toutes les infos sur notre site Internet : http://www.vu7.in/ En conclusion, nous tenons à remercier l’ensemble des clubs et associations qui supportent sans relâche notre activité, sans oublier les copains sur qui l’on peut compter même à l’autre bout du monde et sans qui rien ne serait possible. A très bientôt dans le pile-up… Flo F5CWU (CDXC 929) et Sylvain F4EGD (CDXC 1101). Photos :
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